Tournage de l’émission Dropped : dix personnes décédées suite à la collision entre deux hélicoptères lors du tournage d’une émission de téléréalité à la Rioja en Argentine, le 9 mars 2015

par | 12 Déc 2020

Le Tutour Avocats agit pour la famille de l’un des employés de la société de production, qui a été jugée responsable de leurs préjudices 

Le 9 mars 2015, lors du tournage de l’émission de télé-réalité intitulée Dropped, dont le concept a été arrêté suite à l’accident, 4 anciens grands sportifs et 4 techniciens salariés de la société de production ALP, se trouvaient dans deux hélicoptères qui, dans le cadre d’un vol en formation improvisé, sont entrés en collision causant la mort des 10 personnes à bord, dont les deux pilotes.

Une instruction correctionnelle pour homicides involontaires a été ouverte auprès du TJ de Paris, une procédure d’instruction a également été ouverte en Argentine, une enquête de la Junta de Investigacion, de Accidentes de Aviacion Civil (JIAAC homologue argentin du Bureau d’Enquête et d’Analyse français, a été réalisée donnant lieu à la publication d’un rapport d’investigation.

Celui-ci a schématisé la trajectoire à 360°des deux hélicoptères volant en formation avant leur collision:

Selon le rapport de la JIIAC, la manœuvre ayant conduit à l’accident est due à la combinaison de différents facteurs parmi lesquels :

  • l’impréparation d’une opération inhabituelle (tournage et vol rapproché)
  • l’absence de formation spécifique des pilotes à la technique des vols en formation
  • le manque de procédure d’évaluation formelle des risques liés à la sécurité opérationnelle ayant empêché l’identification et l’analyse des dangers inhérents à une telle opération
  • l’utilisation d’aéronefs dont le préfixe d’identification public ne suppose pas de fournir la logistique et le soutien aérien d’un tournage

La mère, la veuve et les enfants du cadreur, qui se trouvait, à la demande de son employeur, la société de production, harnaché, porte ouverte dans l’un de ces deux hélicoptères, a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale (TASS) de Nanterre pour voir reconnaitre la faute inexcusable de l’employeur.

Le TASS de Nanterre a reconnu la faute inexcusable de l’employeur.

La Cour d’appel de Versailles saisie par l’employeur a, avec force démonstration, confirmé le jugement de première instance et a jugé que :

« en décidant d’organiser le vol en cause de la manière qui a été choisie par elle, la Société a pris un risque qui se trouve à l’origine directe et certaine de l’accident dont a été victime L. S. En d’autres termes, il est particulièrement inexact de considérer, comme l’a fait la Société, qu’elle “ne pouvait (…) prendre la moindre disposition pour préserver les passagers des hélicoptères d’une telle faute de pilotage” : il eût suffi qu’elle prît, par exemple, la décision d’exclure la possibilité de tout vol en formation ou, surtout, plus simplement, qu’elle prît la décision de faire décoller les hélicoptères à plus d’une minute d’intervalle ou, encore plus simplement, de les faire partir directement en direction de la destination à atteindre. 

C’est la décision inverse qui a été choisie, sans que le surcroît de précautions que cela imposait ne soit mises en oeuvre, sans même qu’il soit procédé à un vol d’essai sans passagers, sans même s’assurer qu’il existait un moyen de communication entre les aéronefs ou entre ces derniers et le sol, étant souligné que tant l’intervention de Sax Logistica (à supposer d’ailleurs qu’elle s’étende au site de la Rioja) que celle d’Expeditionary Solutions (dont le plan de sécurité est muet sur la préparation des vols proprement dits) demeuraient sous la supervision, la direction et le contrôle d’ALP, dont le directeur de production, Nicolas R, se trouvait sur place.

Le plan de sécurité et de sûreté, daté du 23 février 2015, s’il prévoit des mesures pour le transport en hélicoptère, ne fait état que des risques de chute depuis une porte et de percussion par le rotor de queue. 

Enfin, à supposer qu’il ait été indispensable de faire voler les hélicoptères selon la trajectoire retenue, s’agissant d’effectuer une rotation à 360°, il existe, selon un témoin, non contredit par la Société, des moyens techniques permettant d’éviter que des images soient réalisées par un cameraman embarqué et de faire voler les appareils à une distance plus grande l’un de l’autre. La Société n’a pas pris les mesures nécessaires pour préserver la santé et la sécurité de son salarié. »

L’employeur a formé un pourvoi devant la Cour de cassation.

Contact : Solenn Le Tutour